Il y a plus de 40 ans, l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) créait son Comité technique sur la protection de l’environnement en aviation (CAEP). Aujourd’hui, le CAEP a mené à bien douze cycles de débats, de recommandations et de révisions de politiques au niveau international.[1]. L’aviation a été le premier secteur industriel à tenter de s’attaquer aux problèmes environnementaux à l’échelle mondiale : un point malheureusement négligé par ses protagonistes. Le CAEP cherche à parvenir à un consensus technique sur ces questions et, au début, l’accent était mis sur la réduction du bruit. Cela était compréhensible, car la technologie des premiers moteurs d’avions civils avait évolué à partir de moteurs à réaction militaires comme le Pratt & Witney J57 et le Rolls-Royce Avon. Le Boeing 707, par exemple, propulsé initialement par un dérivé du J57, était un avion vraiment bruyant.
Les progrès réalisés dans ce domaine sont remarquables et illustrent le potentiel de la technologie pour remédier aux externalités environnementales et autres. Il est compréhensible que l’attention se porte désormais sur l’impact de l’aviation sur les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Dans ce contexte, l’industrie a été dépeinte comme le méchant de la pièce, ignorant largement d’autres secteurs économiques importants émetteurs de pollution, par exemple le transport maritime (en particulier les paquebots de croisière), la fabrication de matériaux de construction à forte intensité énergétique comme le ciment et l’acier, ou la vaste consommation énergétique des centres de données.
Oubliée aussi est la cible de filet Le zéro carbone, c’est reconnaître que l’activité économique implique toujours des compromis, que l’interdiction entraîne des coûts à la fois économiques et sociaux, et qu’il faut toujours privilégier la fixation de prix appropriés pour atteindre les objectifs. Fixer un prix du carbone est le moyen le plus simple et le plus direct d’atteindre les objectifs de la politique environnementale (en minimisant l’utilisation des ressources dans le processus), mais il rencontre généralement peu de succès, en particulier auprès des différents lobbyistes qui promeuvent des solutions dans lesquelles trop souvent, pour reprendre l’expression de Wall Street, leurs clients ont « leur peau en jeu ». Dans cette optique, il faut féliciter le CAEP d’avoir introduit un instrument économique, le Régime de compensation et de réduction du carbone pour l’aviation internationale (CORSIA), pour pousser l’industrie dans la bonne direction.
La « bonne direction » dépend toutefois d’une compréhension plus approfondie du sujet et, à cet égard, il reste du chemin à parcourir, notamment pour dissiper un brouillard qui comprend de la désinformation. Prenons par exemple les mesures des émissions de CO2 de l’aviation exprimées en Émissions « x » par kilomètre-passager payantIl n’est pas du tout évident que les analyses entreprises tiennent compte du fait que, dans le cas des vols long-courriers en particulier, le même avion dessert souvent deux marchés bien distincts, à savoir les passagers et le fret. Les produits d’un vol sont donc communs (dans des proportions variables). Malheureusement, il est courant d’attribuer la totalité de la consommation de carburant et donc des émissions de CO2 qui en résultent au transport des passagers (et de leurs bagages). Or, la consommation de carburant est en grande partie fonction du poids de chargement d’un avion, poids auquel s’ajoute le fret à bord (en soute).
J’ai tenté d’illustrer la confusion entre passagers et fret en utilisant les données de l’aéroport de Londres Heathrow. Dans cet aéroport central, contrairement à Francfort ou Hong Kong par exemple, le débit est en grande partie le résultat du fret en soute. En prenant les données des avions gros-porteurs à Heathrow pour représenter les mouvements long-courriers (environ 40 % du total des mouvements de l’aéroport en 2019), ainsi que (après avoir pris en compte les mouvements de cargos dédiés) environ 1,5 million de tonnes métriques de fret long-courrier en soute cette année-là, on obtient une moyenne de près de 8 tonnes de fret par vol de passagers, ce qui équivaut approximativement à un chargement de 60 à 70 passagers (avec bagages). Les gestionnaires de chargement des avions et autres personnes connaissant les statistiques appropriées seront en mesure de calculer la consommation de carburant induite par le fret.[2]
Quelles sont les implications de cette confusion entre passagers et fret pour le calcul des émissions ? Étant donné que presque tous les vols long-courriers de passagers transporteront du fret en soute, les estimations des émissions de CO2 qui peuvent être attribuées à passagers Les émissions de CO2 sur ces vols sont très probablement exagérées, et ce dans une large mesure. Deuxièmement, les suggestions selon lesquelles les flottes des transporteurs à bas prix (LCC) ont un bilan d’émissions bien meilleur que les flottes court et long-courriers des transporteurs traditionnels nécessiteront un réexamen et probablement un réétalonnage. Et un réétalonnage pourrait également être nécessaire lorsque l’aviation est soumise à des pro rata Les taxes environnementales. De plus, cela implique qu’une partie de la taxe sur les émissions prélevée pourrait être supportée par les expéditeurs de fret aérien plutôt que par les passagers. Cependant, cela a des conséquences sur le commerce mondial des biens et, à la marge, sur la concurrence modale équitable lorsque le fret est également transporté par mer ou, dans le cas de la Route de la soie, par rail. Des mesures de simplification, en utilisant par exemple l’unité de charge de travail (WLU) souvent citée pour calculer une mesure d’émissions appropriée, seraient inappropriées ; les WLU n’ont aucune interprétation économique significative.
Dans l’ensemble, le problème est plus complexe qu’il n’y paraît. Les choses sont rarement aussi simples qu’on le dit souvent, et c’est le cas de nombreux problèmes et de leurs prétendues solutions.
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[1] L’auteur a été le conseiller économique de l’UE pendant deux cycles du CAEP.
[2] La distance moyenne parcourue par un avion de ligne gros porteur via Heathrow est de 3 800 miles.
Livres sur un thème semblable:
Économie Rurale (De l’agriculture – Caton).,Référence litéraire de cet ouvrage.
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